vendredi 16 avril 2010

Faut-il interdire l'avortement au nom du respect de la vie ?



Le strict respect de la vie implique que l'on puisse choisir de tuer l'embryon si deux critères sont réunis :

- l'avortement envisagé permet la survie de la mère
- la survie de l’enfant est hasardeuse.


Une vie vaut une vie.

Mais la réalité est plus compliquée que ces purs principes. Nul ne peut prétendre à la pureté complète. Au surplus, pourquoi la collectivité publique imposerait une règle absolue dans un domaine aussi intime de la sphère privée ?

La nomination de Simone Veil le 18 mars 2010 comme membre de l’Académie Française a donné lieu à un concert médiatique de louanges. A cette occasion, l’avortement, légalisé en 1975 sous son ministère et à son initiative, a été présenté comme une grande réussite sur le chemin de la «libération de la femme».

Mais l’unanimité de la presse officielle et subventionnée m'inspire aussitôt de la méfiance.

On peut aussi utiliser sa capacité à réfléchir, plutôt que de gober ce que la pensée unique veut faire avaler.

En France, il y a eu 816.500 naissances, et 227.000 avortements en 2007, dernière année pour laquelle les chiffres sont disponibles. Ces chiffres en eux-mêmes posent question.

D'autre part, plus la science avance, plus l'on démontre l'impact de la vie embryonnaire sur la vie adulte. Par exemple, on sait maintenant que l'apprentissage d'une langue est facilitée si l'embryon a vécu dans un environnement linguistique correspondant à cette langue.

Ensuite, l'histoire de la loi sur l'avortement et de son application ultérieure invitent aussi à la réflexion.

La loi dans son intention et ses versions d'origine acceptait l'avortement lorsque survenait une situation indépendante de la volonté de la mère :

1- en cas de viol
2- en cas d'inceste, si le père dispose d'un ascendant d'autorité de fait ou de droit
3- en cas de danger pour la santé physique de la mère
4- en cas de maladie létale pour l'enfant à naitre

Dans les quatre cas cités plus haut, la volonté de la mère est heurtée avec violence par les circonstances.

Dans ces conditions, on pouvait donc comprendre les motivations qu'il y avait à supprimer une vie, en vue de la préservation de la mère survivante, qui est victime plus qu'acteur.

Mais le débat parlementaire de 1975 a perdu la dignité qui aurait dû prévaloir sur ce sujet. Simone Veil a été brocardée dans des conditions incorrectes. Par réaction, le texte mis aux voix a été habilement rendu très flou pour offrir moins de prise à des adversaires hargneux. Ce flou a permis une interprétation ultérieure extensive au nom de la "libération de la femme".

Dans le texte de la loi de 1975, l'avortement est finalement permis en cas de "situation de détresse". Ce libellé est imprécis. Or une loi a pour objet de fixer les contours précis d'une règle. L'introduction de cette notion floue est une dérive, résultat d'un débat peu digne. Cette dérive ouvre la porte à toute interprétation.
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Par l'introduction de cette dérive, on donne la possibilité de mettre en balance une vie humaine et un besoin de confort.

Par l'introduction de cette dérive, on prend le risque d'avilir l'acte sexuel, qui devient alors un jeu comme un autre, dont le seul perdant est l'enfant à naître qui devient un gêneur.

Par l'introduction de cette dérive, on amoindrit la responsabilité du père, qui peut partir sans risque à la conquête de ses «proies sexuelles», et qui peut toujours exercer une cynique pression psychologique pour demander l'élimination du fruit de ses conquêtes.

De plus, en l'état actuel de la loi, une mère peut refuser l'enfant qu'elle porte en elle au motif secret que le père est d'une race différente...! Cela invite à réfléchir. Cette possibilité d'avortement pour motif racial est un cruel paradoxe quand on sait que Simone Veil est une survivante des camps de déportation du régime socialiste national allemand, régime caractérisé précisément par son eugénisme et son racisme.

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Prenons du recul pour mieux envisager la situation. Arrêtons notre soumission à la pensée unique, et regardons autour de nous. La loi sur l'avortement dans sa version et son application actuelle invitent à la critique. Qu'est-ce que la loi a apporté ? Qu'est-ce que la loi a démoli ?

En particulier, voyons à quel point la soi-disant "libération de la femme" opérée par cette loi, est en substance et en priorité une libération de la sexualité des hommes. Les 35 ans d'application de cette loi doivent nourrir notre réflexion. Comment les moeurs ont-elles évolué depuis 35 ans ? Quel est l'impact sur la stabilité des couples et des familles ?

Nous devons aussi intégrer dans la réflexion les nouvelles découvertes scientifiques sur la vie intra utéro.

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Pour stopper les dérives, je propose que l’on s’en tienne aux quatre critères d’origine quant à l’autorisation légale d’avortement. Au fond, je crois que l'avortement doit être permis par la loi si la mère est dans une situation indépendante de sa volonté.

Voilà le texte actuel :

" Art. L. 162-1. - La femme enceinte que son état place dans une situation de détresse peut demander à un médecin l'interruption de sa grossesse. Cette interruption ne peut être pratiquée qu'avant la fin de la dixième semaine de grossesse."


Voilà le texte que je propose :

" Art. L. 162-1. Lorsque l'acte sexuel est forcé ou incestueux, lorsque que l'enfant à naitre est atteint de pathologies à conséquences mortelles, ou lorsque la survie de la mère est menacée par la grossesse, la femme enceinte peut demander à un médecin l'interruption de sa grossesse. Cette interruption ne peut être pratiquée qu'avant la fin de la dixième semaine de grossesse."

Au délà de ce texte, une application plus restrictive et plus respectueuse de la vie est possible, par exemple en cas de viol. Mais une pratique plus restrictive relève à mes yeux de choix privés. La puissance publique doit s’abstenir d’aller trop avant dans l’intimité des consciences, tout en protégeant les innocents de l’eugénisme.

Difficile équilibre !...

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