jeudi 22 janvier 2009

Le chômage a t'il une solution ?

Résumé : Le chômage est dû aux gains de productivité et à l'éviction des moins performants.

Augmenter la production plus vite que les gains de productivité pour employer plus de monde est une solution de court terme.
L'autre solution, qui consiste à limiter partout le temps de travail est une solution qui montre aussi ses faiblesses.
Il y a une solution plus adaptée. Le taux de l'assurance chômage versée par l'employeur doit être en proportion du volume d'heures par salarié. Avec ce taux progressif, l'employeur a intérêt à employer 5 salariés à 30 heures plutôt que 3 salariés à 50 heures. Le taux progressif est calculé sur la base d'un objectif de chômage de transition à 3%.
L'un des bénéfices secondaires de cette solution est que la baisse du taux de chômage génère une chute du coût des cotisations, ... au profit de tous !

L'article est présenté sous la forme d'un dialogue.

Pouchki : Il y a chaque mois 500.000 chômeurs de plus aux Etats-Unis. C’est la preuve qu’il ne fonctionne pas ton système capitaliste !

Toju : Oh là, tout doux, Pouchki, ce n’est pas mon système. Je t’ai dit à quel point je suis pour rétablir la responsabilité des banques pour éviter les crises systémiques et les pics de chômage.
Les banques génèrent des excès de liquidités et la masse d'argent en circulation est très supérieure à la valeur réelle représentée.
Pour remédier à ces excès, les banques doivent payer un taux plus important auprès des banques centrales si elles engagent plus d’argent par rapport à leurs fonds propres. Avec ce taux proportionnel, chaque banque paie son risque.
Les banques ont dérivé de façon irresponsable, je crois que nous devons leur restituer leur responsabilité.

Pouchki : Tu ne vas quand même pas accuser les banques de tous les malheurs ! C’est trop facile ! Même quand les banques ne sont pas en difficulté, il y a des cycles de chômage.

Toju : Oui, les banques n’ont fait qu’accélérer l’effet de règles construites en dépit du sens pratique. D’ailleurs, entre elles, elles se prêtent en prenant en compte le ratio entre encours et fonds propres. C’est le « rating » bancaire. Elles exigent de leurs consoeurs ce que les banques centrales n’exigent pas des banques de second rang ! La vraie irresponsabilité à la source, c’est l’irresponsabilité de ces gros monopoles publics que sont ces banques centrales.

Au fond, ton objection est juste : même avec un système bancaire sain, il peut y avoir du chômage.

Pouchki : C’est donc bien la preuve que ça ne marche pas. Le chômage est un désastre économique et psychologique, et le capitalisme est incapable de trouver un remède. Les plus faibles sont écrasés. Et le chômage est une vraie menace pour faire taire les salariés.

Toju : Arrête d’être négatif, Pouchki, construisons plutôt une solution !

Pouchki : Une solution, t’es drôle. On en a essayé des dizaines de solutions, pourquoi on y arriverait aujourd’hui alors que ce problème est récurent depuis que le salariat est en place.

Toju : Pouchki, tu sais bien que tant que l’on pose des mauvaises questions on obtient des mauvaises réponses. Et quand il y a des mauvaises réponses inventées par un homme qui semble avoir réfléchi, ces mauvaises réponses sont répétées par des millions de perroquets.

Pouchki : Tu parles de façon obscure, Toju, que veux tu dire par mauvaise réponse ?

Toju : La mauvaise réponse qui est répandue avec la plus lourde obstination, c’est que la croissance économique est le remède contre le chômage. C’est pourtant une énormité ! On entend dire que pour avoir un taux de chômage maîtrisé, il faut une croissance de 3%.

Pouchki : Franchement, je ne vois pas où est l’énormité. Tu affabules, Toju ! Si l’on produit plus, il est bien évident qu’il faut plus de gens pour produire, donc il y aura moins de chômeurs.

Toju : Arrête de dire que j’affabule, ça m’agace. Prend plutôt ta calculette. La vie d’un homme est maintenant d’une durée d’environ 80 ans.

Pouchki : Et alors ?

Toju : Et alors, si le taux de croissance est de 3% pendant la durée de la vie d’un homme, cela veut dire que la richesse est multipliée par 1,03 puissance 80.

Pouchki : Si l’on fait 1,03 puissance 80, cela donne : 10,64. Ca fait 10 fois plus de voitures, 10 fois plus de nourriture, 10 fois plus de soins médicaux, 10 fois plus d’heures d’enseignement, 10 fois plus d’équipements ménagers. Ou alors cette démultiplication doit être le fait de nouveaux produits et services. En fait, leur solution qui consiste à prétendre que pour éviter le chômage, il faut 3% de croissance, c’est assez idiot en effet. C’est pourtant ce qu’on entend à longueur de discours quand on parle de « Plan de relance » !
Dis moi, Toju, tu me fais bien rigoler avec tes chiffres, je sais bien que l'arbre de la production ne pousse pas jusqu'au ciel, mais tu ne me dis pas pour autant pourquoi il y a des chômeurs. En plus, tu évites le débat sur les solutions à apporter.

Toju : Je n’évite rien du tout, Pouchki, je fais le ménage sur l’établi avant de travailler. Maintenant, imagine toi un groupe de 1000 personnes vivant sur une grande île.

Pouchki : Ca y est, te voilà reparti dans des théories idéales !

Toju : Mais non, tu vas voir que l’on est très loin de la théorie.

Sur cette île, il y a un artisan qui produit des charrettes, nécessaires pour traverser l’île de part en part. Il est physiquement incapable de produire assez de charrettes pour les habitants, et il a besoin chaque semaine de 100 heures de travail en plus. Il a le choix entre recruter deux ouvriers pour faire 50 heures chacun, ou 4 ouvriers pour faire 25 heures chacun.

Pouchki : Son choix est évident, il va recruter seulement deux ouvriers. Il n’aura que deux personnes à former et à surveiller, que deux comptes à établir.

Toju : La production nécessite moins de bras qu’il n’y a de bras disponibles. C’est la première source du chômage.

Pouchki : Alors là, je te trouve primitif dans ton raisonnement. En plus, cela fait très longtemps que toute une frange des théoriciens de gauche militent pour la répartition du travail. Tu n’inventes rien.

Toju : Oui, je te l’ai déjà dit, les théoriciens de gauche ont souvent des bonnes analyses, qu’il assortissent de solutions trop intellectuelles pour être efficientes. Mais continuons notre histoire.

Imagine maintenant que le producteur de charrette invente un procédé pour être plus efficace dans sa production, et qu’il n’ait plus besoin que de 50 heures de travail en plus de son propre travail.

Pouchki : Alors là, il va garder le meilleur des deux ouvriers.

Toju
: Oui, voilà, tout le sujet du chômage est là. L’augmentation de la productivité évince les moins bons. Et nous avons vu que ce n’est pas la croissance infinie de la production et de la consommation qui remédie à long terme au problème. Il peut y avoir des périodes d'augmentation forte de la production et d'augmentation modérée de la productivité : le chômage sera alors faible, mais de façon transitoire.

Pouchki : Donc la limitation légale du temps de travail est une bonne chose, c’est la vraie solution.

Toju : Non, c’est un idéal absurde. Les gens sont différents entre eux. Certains sont capables de travailler longtemps et bien. D’autres sont capables de travailler moins longtemps. Certains secteurs ont des compétences nombreuses à disposition, d’autres sont en pénurie de main d’œuvre. Bref, l’idée d’imposer une limitation universelle des horaires de travail est un frein au bon emploi des compétences.

Pouchki : Alors, si tu laisses faire, il y aura toujours un effet d’éviction et des chômeurs sur le carreau ! Les employeurs vont toujours prendre les meilleurs et se soucier comme d’une guigne des autres. Et qui vient au secours de ces chômeurs, alors ? Qui paie ? Une assurance privée est impossible, car celui qui est évincé dès le départ de sa vie est un risque trop important pour un assureur : il ne sera jamais un client rentable !

Toju : Oui, le chômage peut générer un coût très élevé, et il convient de faire payer celui qui est à la source de ce chômage, c’est-à-dire l’employeur.

Pouchki : Tu te moques de moi, Toju, les employeurs sont déjà les payeurs de l’assurance chômage ! Sur ma fiche de paye, il y a une part qui est prélevée au profit de l’assurance chômage.

Toju : Oui, mais tous les employeurs payent le même pourcentage, quel que soit le secteur, et quel que soit le volume d’heures travaillées. Celui qui génère le plus de chômage, c’est celui qui emploie un ouvrier alors qu’il y a deux compétences disponibles sur le marché. D'ailleurs, on ne peut pas lui en vouloir, il défend les intérêts de son entreprise.

Pouchki : C’est comme en matière bancaire, tu veux faire payer à l’auteur du déséquilibre le coût de ce déséquilibre.

Toju : C’est exact. La cotisation chômage doit être en proportion du nombre d’heures de travail pour chaque salarié. On réintègre des coût qui étaient répartis à tort de façon homogène. C’est aussi juste qu’efficace.

Pouchki : Au fond, cela veut dire que tu supprimes le nombre légal d’heures de travail.

Toju : Non, ce serait trop brutal et anxiogène. Le volume d'heures légal de travail demeure comme point de référence. Il peut même être abaissé, et constituer un seuil au-delà duquel commence la progressivité des cotisations. Ainsi les heures sont réparties de façon plus adaptée, avec une incitation à réintégrer les salariés évincés. Plus le taux proportionnel est fort, plus l’employeur est incité à prendre deux ouvriers plutôt qu’un.

Pouchki : Et en pratique, comment on calcule ce taux proportionnel ?

Toju : Le taux proportionnel est calculé sur la base d’un objectif de chômage de transition à 3% par exemple. Si le chômage augmente au dessus de 3%, la proportionnalité augmente. D'ailleurs, une fois la position d'équilibre trouvée, les taux auront des variations très faibles.
De plus, le montant total des cotisations sera diminué. Figures-toi qu'en passant d'un taux de chômage à 9% à un taux de chômage à 3%, le montant de la cotisation sera divisé par trois...

Pouchki : Ah, je vois que tu es d'humeur taquine ! En fait, tu proposes toujours la même solution. Réintégrer les coûts au niveau de l’acteur qui génère ces coûts.

Toju : Oui, c’est vrai. Tu sais, les systèmes qui s’éparpillent dans tous les sens choquent bien peu de monde. Notre société a une vision quantitative et de court terme. Il est nécessaire de s’arracher à sa condition d’homme moderne pour gagner en lucidité, proposer des solutions de long terme, et revenir vers une société apaisée.

Pouchki : Arrête de philosopher, Toju, dis-moi pourquoi ce système n'est pas en place si ton idée est si bonne?

Toju : Patience, Pouchki, patience, cultivons l'espérance. L'Histoire est cyclique et les solutions apparaissent quand la situation est mûre.

3 commentaires:

polo a dit…

Bonjour

Je viens ici pour la première fois après avoir lu le Psychothérapeute.
Bon, je suis direct, je suis en total désaccord avec ce que je viens de lire.
Dans votre exemple, vous écrivez "L’augmentation de la productivité évince les moins bons", ce qui est une erreur d'appréciation. Cette productivité libère le moins bon dans la production précédente. Ce n'est qu'une libération pour produire autre chose, et si au lieu de produire cette personne se trouve au chômage, c'est qu'il y a une barrière à l'apparition d'une nouvelle production, c'est que le coût de création de la nouvelle production est élevé par des barrières. Cherchons les barrières et éliminons les, toutes barrières réglementaires qui ralentissent les échanges entre les hommes.
La base est que les besoins humains sont infinis, non pas nombre de voitures, mais en tout ce qui peux nous faire envie à un moment donné, comme une voiture à couleurs changeante, qui fait du bruit, pliable, avec échasses incorporées... La croissance n'est pas le nombre de voitures mais aussi et surtout l'ensemble des services fournis par la voiture.

Sylvain JUTTEAU a dit…

Polo,

Merci pour votre contribution.

La situation que vous décrivez se produit en effet par périodes.

Dans cette situation, la production est en expansion, et la productivité ne suit pas le rythme. La main d'oeuvre requise est alors importante et le chômage est bas.

Oui, tout cela est possible, et s'est d'ailleurs réalisé à plusieurs reprises. Ce fut le cas par exemple en Europe Occidentale entre 1950 et 1973.

Mais considérer que cela est possible de façon durable relève de l'idéal. La force redoutable d'un idéal, c'est qu'il peut rester à l'état d'idéal et n'être jamais démenti par les faits.

Anonyme a dit…

Je propose un système où l’argent, qui n’est maintenant plus que des nombres, peut être utilisé à sens unique. Qu’il soit délivré par le l’État, par la B.C.E. ou par le F.M.I., aucune importance, c’est le "fournisseur", la "source".
L’argent ne doit pas être comme l’eau qui se recycle par l’évaporation et la pluie, il devrait être comme l’oxygène: quand il a servi, il n’est plus nulle part; quand l’argent sortirait d’un compte, il n’entrerait pas dans un autre, sauf quand il sortirait du "fournisseur" pour rentrer dans le compte de chaque citoyen. La source est simple : il n’y a qu’à corriger le nombre qui indique le solde du compte "fournisseur".
Les conséquences :
Le travail serait libre et pourrait se faire SELON LES BESOINS, non réglementé par l’argent. Les coûts ne seraient plus un obstacle. Il serait plus facile de faire l’indispensable et le nécessaire.
Il n’y aurait plus aucune charge sur les salaires, ils seraient nets.
Des produits et des services seraient gratuits, comme les assurances, tout ce qui concerne la santé, l’éducation, les retraites, etc. Ceux qui feraient ces services seraient tout de même payés comme les autres, par la "source".
Des produits indispensables ne seraient pas gratuits afin d’obliger le monde à travailler, mais seulement selon son aptitude.
Voyez mon site : Avenir et présent
J'ai proposé mon système au gouvernement, 7 fois au Premier ministre, qui ne m’a jamais répondu, et 1 fois au Président de la République, qui m’a répondu un peu à côté comme s’il n’avait pas pris connaissance du sujet.
Si vous voyez quelque inconvénient, n’oubliez pas de commenter.
André.