Privé ou public, c’est l’éternel combat.
Qui sont les acteurs de ce combat ? Comment se comportent-ils ?
La droite prône la réduction de la sphère publique, sans toujours la pratiquer. En France, par exemple, le nombre de fonctionnaires continue de progresser , et les impôts et taxes sont plus nombreux que jamais.
La gauche prône l’extension de la sphère publique, sans toujours la pratiquer. On peut à titre d’exemple citer les années Jospin, qui ont été les plus actives dans les opérations de privatisation.
La différence entre le discours et l’action montre que ce sont des postures idéologiques factices.
C’est d’ailleurs à tort que la répartition entre le public et le privé est chargée d’idéologie, car la répartition optimale a une solution fondée sur des critères objectifs.
La solution véritable est une solution centriste. C’est-à-dire dépolluée d’idéologie.
Quelle est l’intervention publique optimale ?
L’intervention publique optimale est tout d’abord fonction de l’utilité des biens produits.
Un marteau est-il utile ? Un soin médical est-il utile ? Un air pur est-il utile ?
La réponse se dispense d’idéologie.
Ensuite , quelle que soit son utilité, ce bien ou ce service sont plus ou moins cessibles sur un marché :
- Un marteau est cessible sans difficulté.
- Un soin médical est cessible, mais si le malade est trop malade pour travailler, il a moins de ressources pour payer. Le soin médical est moins cessible que le marteau.
- Un air pur est utile pour respirer, mais il est peu cessible faute de vendeur. L’air pur est moins cessible que le soin médical.
Si un bien est très utile mais incessible sur un marché, l’intervention publique est requise. Par exemple, l’air pur est utile mais peu cessible faute de vendeur. D’où l’intervention publique pour fixer des règles anti-pollution.
Toutefois, si ce bien incessible est produit par altruisme, l’intervention collective est inutile. Pour l’air pur, par exemple, si chacun fait des efforts par altruisme pour ne pas polluer, l’intervention publique est sans objet.
En résumé, l’intervention publique optimale (P) est proportionnelle au rapport entre la cessibilité (C) et l’utilité (U), déduction faite de l’altruisme (A) :
P = U/C – A
Quels enseignements en tirer ?
Altruisme ou intervention publique
Tout d’abord, si la sphère publique est insuffisante, et que l’altruisme n’y supplée pas, la situation est déséquilibrée, et cruelle pour les plus faibles.
Et à l’inverse, si la sphère publique progresse de façon exagérée, l’altruisme se réduit. Si la sphère publique déborde au-delà de ce qui est utile, les relations de charité entre les Hommes sont réduites au profit d’une relation verticale avec la collectivité publique.
En effet, pourquoi demanderais-je du soutien financier à ma famille et à mes amis, si la collectivité publique me verse une allocation ?
Observons que la destruction des relations de charité entre individus d’une même famille, d’une même corporation professionnelle, d’un même quartier ou d’un même village, entre amis, profite aux prosélytes de la sphère publique à gauche, et aux promoteurs du darwinisme social à droite.
La gauche se réjouit du prélèvement forcé sur les riches pour les distribuer aux pauvres. La gauche se réjouit de la progression de la sphère publique nourrie par ces prélèvements forcés. Elle fait prévaloir une société idéalisée, pensée en lieu et place de l’Homme.
La droite se réjouit de voir chacun maintenu en état de participer à la compétition individuelle, moteur de l’économie. La droite se réjouit aussi d’avoir une masse de consommateurs solvables, pour assouvir sa nouvelle idolâtrie de l’argent.
L’extension irraisonnée de la sphère publique satisfait les deux idéologies. Les relations verticales entre la collectivité publique et l’individu isolé l’emportent sur les relations horizontales. Observons que le faible taux de syndicalisation, l’éclatement des familles, sont favorables à l’emprise directe du politique. La gauche et la droite, dans un même cynisme, se repaissent d’individus isolés et manipulables.
Et pour parvenir à leurs fins, toutes les vilénies de la propagande sont utilisées, telles que l’illusion de la gratuité des services publics
C’est donc un travail énorme que de revenir à une vision assainie de la politique.
Le politique doit revenir à ce qui est techniquement utile, abandonner ces idolâtries, rétablir la juste place de l’altruisme.
Mais pour une même personne, l’altruisme ne varie pas selon les produits ou les services. Et pour l’ensemble des Hommes, les variations de l’altruisme suivent de longs cycles historiques.
En conséquence, dans le rapport « P = U/C – A », le classement se fera selon les deux autres variables, l’Utilité et la Cessibilité.
Utilité et cessibilité
L’utilité se détermine comme une utilité relative. Boire et manger est plus utile que de posséder une montre. Posséder une montre est plus utile que d’avoir des robinets en or.
La cessibilité est la possibilité d’accord entre un vendeur et un acheteur sur un prix représentant la valeur du bien.
En conséquence, pour un bien utile, chaque fois qu’un des éléments constitutifs de la cessibilité faillit, et que l’altruisme n’y pallie pas, l’intervention collective est nécessaire pour se rapprocher de l’optimum de production des biens.
Les quatre facteurs de défaillance de la cessibilité sont :
a) Insuffisance des acheteurs
b) Insuffisance des vendeurs
c) Versement de prix différé
d) Valeurs négatives ou valeurs positives exclues du prix.
a) Insuffisance des acheteurs
Le cas typique est le traitement de la maladie. Plus on est malade, plus il est difficile de payer ses soins. D’où l’apparition des ordres religieux hospitaliers, les sœurs infirmières. D’où, dans un système de moindre altruisme, le service public de santé.
Il en est découlé aussi les systèmes d’assurance santé privés, mais avec une intervention de la puissance publique pour rendre ces systèmes obligatoires et interdire la discrimination des risques.
Le service de la santé est le cas typique de la défaillance de l’acheteur de services, suppléé par l’altruisme, ou, à défaut, par l’intervention publique.
b) Insuffisance des vendeurs
Le cas typique est celui de la monnaie.
La monnaie est la représentation de la valeur. Cette représentation implique la confiance maximum dans l’outil de représentation, la permanence, et l’universalité de la représentation.
Sur un territoire donné, pour agréger la totalité des engagements de confiance réciproque, il ne peut y avoir qu’un seul organe. Par définition, la totalité est insécable, sinon elle n’est plus une totalité.
La pluralité de vendeurs est incompatible avec la nature même de la monnaie.
Comme il y a insuffisance du nombre de vendeurs de monnaie – il n’y en a qu’un seul ! - et que le niveau d’altruisme est insuffisant pour que chacun s’engage à vendre sans contrepartie pour les autres, l’intervention collective permet de mieux s’approcher de l’optimum. C’est donc un organe unique et public qui produit la monnaie.
c) Versement de prix différé
C’est le cas des équipements dont le retour sur investissement est très long. Ainsi du réseau ferré.
C’est le cas des recherches scientifiques dont le retour sur investissement est au-delà de dix ans par exemple.
C’est le cas de la protection du patrimoine bâti et naturel dont le retour sur investissement se mesure en siècles.
d) Valeurs hors du prix
Les valeurs hors du prix peuvent être les valeurs négatives telles que les pollutions visuelles, sonores, atmosphériques, aquatiques. On peut citer le cas d’une usine polluante.
Il s’agit aussi des valeurs positives non incluses dans le prix, tels que les bénéfices secondaires à long terme de l’éducation, ou de la construction d’une route.
A quoi sert cette recherche d’optimum ?
Sur la base des quatre critères d’incessibilité, nous pouvons classifier tous les biens et services, et les mettre en regard de leur niveau d’utilité, et du niveau d’altruisme constaté.
Cette application clarifie le point d’équilibre entre l’intervention publique et la libre initiative.
Au-delà de cet aspect pratique, cette application a pour conséquence de chasser l’idéologie d’un lieu où elle n’aurait pas dû pénétrer. L’idéologie est un filtre déformant de la réalité.
Au fond, le centrisme, c’est briser les idoles pour rechercher la vérité.
Comme la vérité est éternelle, et que le mensonge est provisoire, tout espoir est permis si l'on cherche la vérité.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire